QUARANTE-QUATRE

 

— Pourquoi tu as fait ça, Tak ?

— Fait quoi ?

J’étais avec Murakami sous les projos directionnels de l’Empaleur, à regarder les yakuzas partir dans une belle Prairiemobile noire que Tanaseda avait fait venir par téléphone. Ils repartaient vers le sud, laissant un large sillage de la couleur d’un vomi laiteux.

— Pourquoi tu l’as cherché comme ça ?

Je regardais le glisseur qui repartait.

— Parce que c’est une merde. Parce que c’est un putain de criminel et qu’il ne veut pas le reconnaître.

— Tu ne deviens pas un peu sectaire sur ton grand âge ?

— Tu crois ? C’est peut-être juste mon avis de gars du Sud. Tu viens de Millsport, Tod, tu es peut-être trop près pour le voir.

— OK, a-t-il admis avec un gloussement. Alors dis-moi ce que tu vois, toi.

— La même chose qu’avant. Les yakuzas qui se cachent derrière leur prétendue ancienne tradition d’honneur et qui pendant ce temps-là s’occupent de la même criminalité mesquine que les autres, tout en s’acoquinant avec les Premières Familles.

— Plus maintenant, on dirait.

— Allons, Tod, sois sérieux. Ces types sont de mèche avec Harlan et les autres depuis qu’on est arrivés ici. Tanaseda va peut-être payer pour son erreur Qualgrist, mais les autres feront les bruits polis qu’il faut, et tout ira bien. Retour aux mêmes trafics illicites et à l’extorsion douce qu’ils ont toujours pratiquée. Et les Premières Familles laisseront faire les bras ouverts, parce que c’est un fil de plus dans le filet qu’ils ont lancé sur le monde.

— Tu sais… (Le rire n’avait pas quitté sa voix.) Tu commences à parler comme elle.

— Elle qui ?

— Quell, mec. Tu commences à parler comme Quellcrist Falconer, putain…

Sa remarque a plané entre nous quelques secondes. Je me suis détourné et j’ai regardé dans la nuit de la Prairie. Reconnaissant peut-être les tensions irrésolues qui subsistaient entre Murakami et moi, Jad avait préféré nous laisser seuls pendant que les yakuzas se préparaient à partir. La dernière fois que je l’avais vue, elle montait sur l’Empaleur avec Vlad et sa garde d’honneur. Une histoire de café au whisky.

— D’accord, Tod, ai-je dit d’une voix égale. Alors réponds-moi. Pourquoi Tanaseda est-il venu te voir pour remettre sa vie d’aplomb ?

Il a fait la grimace.

— Tu l’as dit, je suis né à Millsport. Et les yak aiment bien avoir des connexions haut placées. Ils ne me lâchent plus depuis que je suis rentré de ma première perm des Corps, il y a cent et quelques années. Ils pensent qu’on est amis de longue date.

— Et c’est le cas ?

J’ai senti son regard. Sans réagir.

— Je suis Diplo, Tak, a-t-il fini par dire. N’oublie pas.

— Ouais.

— Et mon ami, c’est toi.

— C’est bon, Tod, je suis déjà dans ton camp, pas la peine de me jouer ça. Je t’emmène chez Segesvar par la petite porte à condition que tu m’aides à le foutre en l’air. Tu y gagnes quoi, toi ?

Il a haussé les épaules.

— Aiura doit tomber pour infraction aux directives du Protectorat. Le double enveloppement d’un Diplo…

— Ex-Diplo…

— Parle pour toi. Lui n’a jamais quitté officiellement les Corps diplomatiques. Et rien que pour avoir gardé cette copie, quelqu’un dans la hiérarchie Harlan doit tomber. Effacement garanti.

Sa voix avait un tranchant étrange. Je l’ai regardé de plus près. Puis l’évidence m’a sauté aux yeux.

— Tu penses qu’ils en ont aussi une de toi, hein ?

— Tu as quelque chose de spécial pour être le seul sauvegardé ? Tak, ça n’aurait aucun sens. J’ai vérifié les archives. À ce recrutement, on a été une dizaine de Harlan à s’engager. Celui qui a décidé de prendre cette assurance a dû tous nous copier. On a besoin d’Aiura vivante pendant suffisamment de temps pour nous dire où ils sont dans les données du gouvernement.

— D’accord. Quoi d’autre ?

— Tu sais quoi d’autre.

La Prairie a de nouveau envahi mon regard.

— Je ne vais pas t’aider à massacrer Brasil et les autres, Tod.

— Je ne te le demande pas. Par respect pour Virginia, au moins, je vais essayer d’éviter. Mais il faut que quelqu’un paie la note des Scarabées, Tak. Ils ont tué Mitzi Harlan dans les rues de Millsport !

— Quel drame. Sur toute la planète, les éditeurs de pages à scandales pleurent à chaudes larmes…

— D’accord. Ils ont aussi tué va savoir combien de victimes secondaires dans le même temps. Policiers. Passants innocents. J’ai toute latitude pour clore cette opération, sous l’estampillage « agitation politique stabilisée », sans qu’on soit obligés de se déployer après coup. Mais il faut que je leur donne des boucs émissaires, ou les auditeurs des Corps vont me tomber dessus comme du barbelé autonome. Tu le sais, tu sais comment ça marche. Il faut que quelqu’un paie.

— Ou ait l’air de payer.

— Exactement. Mais pas forcément Virginia.

— « Une ex-Diplo dirige une révolte planétaire. » Oui, je comprends pourquoi les relations publiques des Corps diplomatiques n’apprécieraient pas forcément.

Il s’est arrêté et m’a regardé avec hostilité.

— C’est vraiment ce que tu penses de moi ?

— Non. Excuse-moi.

— Je fais de mon mieux pour tout boucler avec un minimum de dégâts pour les gens qui comptent, Tak. Et tu ne m’aides pas beaucoup.

— Je sais.

— J’ai besoin de quelqu’un pour le meurtre de Mitzi Harlan, et j’ai besoin d’un meneur. Quelqu’un qu’on pourra faire passer pour le génie criminel qui a tout manigancé. Et deux ou trois autres, pour étoffer la liste des arrestations.

« Si au final je dois me battre et mourir pour le fantôme et le souvenir de Quellcrist Falconer, et non pour la femme elle-même, alors ce sera mieux que de ne pas combattre du tout. »

Les paroles de Koi dans le flotteur échoué sur Vchira Beach. Ses paroles et l’étincelle de passion autour de son visage tandis qu’il les prononçait. La passion, peut-être, d’un martyr qui avait raté sa chance la première fois et ne comptait pas la laisser passer de nouveau.

Koi, ancien des Brigades Noires.

Mais Sierra Tres avait dit à peu près la même chose pendant qu’on se cachait dans les canaux et les ruines effondrées d’Eltevedtem. Et le comportement de Brasil le disait pour lui en permanence. Peut-être ne désiraient-ils rien d’autre que devenir martyrs pour une cause plus ancienne, plus grande et plus importante qu’eux-mêmes.

J’ai écarté mes pensées, les ai quittées avant qu’elles arrivent à leur destination.

— Et Sylvie Oshima ? ai-je demandé.

— Eh bien… D’après ce que j’ai compris, elle a été attaquée par une chose sortie de la zone à nettoyer. Si nous pouvons la sauver dans la fusillade, nous devons la décontaminer et lui rendre sa vie. Ça te paraît raisonnable ?

— Ça me paraît intenable.

Je me rappelais ce que Sylvie disait sur le logiciel de commandement à bord du Guns for Guevara. « Et même si on paie un bon nettoyage après coup, il reste des saloperies. Des traces de code résistant. Des données fantômes. » Si Koi pouvait se battre et mourir pour un fantôme, qui savait ce que les néoquellistes feraient de Sylvie Oshima, même après l’effacement de sa tête ?

— Vraiment ?

— Allez, Tod, c’est une icône. Quoi qu’il y ait en elle, ou quoi qu’il n’y ait pas, elle pourrait être le cœur d’une toute nouvelle vague néoquelliste. Les Premières Familles vont vouloir la liquider par principe.

Murakami a eu un sourire féroce.

— Ce que les Premières Familles veulent et ce qu’elles vont obtenir, c’est radicalement différent, Tak.

— Ah ouais ?

— Ouais. Parce que si elles ne coopèrent pas complètement, je vais leur promettre une force d’assaut diplo complète.

— Et s’ils te prennent au mot ?

— Tak, je suis Diplo. C’est notre boulot de jouer au bras de fer avec les régimes planétaires. Ils vont plier comme une putain de chaise de jardin, et tu le sais. Ils seront tellement contents de trouver une porte de sortie qu’ils enverront leurs enfants me torcher avec la langue, si je leur demande.

Je l’ai regardé, et j’ai eu l’impression qu’une porte venait de s’ouvrir d’un coup sur mon passé de Diplo. Il était là, encore souriant dans les projecteurs, et il aurait aussi bien pu être moi. Et je me suis rappelé ce que c’était vraiment. Ce n’était pas l’impression d’appartenance qui m’est revenue. C’était la puissance brutale de l’accession aux Corps. La sauvagerie libératrice qui naissait quand on comprenait à quel point on était craint. Qu’on parlait de vous à mi-voix dans tous les mondes colos et que même dans les couloirs du pouvoir sur Terre, les puissants se taisaient en entendant votre nom. C’était un trip égotiste plus fort que n’importe quel tétrameth. Ces hommes et des femmes qui pouvaient effacer ou briser des centaines de milliers de vies d’un simple geste, on pouvait leur réapprendre la peur. Et l’instrument de la leçon, c’était les Corps diplomatiques. C’était vous.

Je me suis forcé à sourire.

— Tu es charmant, Tod. Tu n’as pas changé d’un poil, hein ?

— Non.

Et d’un coup, mon sourire n’était plus forcé. J’ai ri, et ça a paru débloquer quelque chose en moi.

— D’accord. Vas-y, accouche, enfoiré. Comment on fait ?

Il m’a encore fait sa grimace de clown, les deux sourcils relevés.

— J’espérais que tu allais me le dire. C’est toi qui as le plan des lieux.

— Ouais, je voulais dire : avec quoi on attaque ? Tu ne comptes pas utiliser…

Murakami a indiqué du pouce la masse de l’Empaleur.

— Nos amis aux idées pointues ? Bien sûr que si.

— Putain, Tod, c’est des gosses camés à la meth. Les haiduci vont les tailler en pièces.

Il a eu un geste désinvolte.

— On travaille avec ce qu’on a, Tak, tu sais ce que c’est. Ils sont jeunes, en colère et gonflés à la meth, et ils cherchent quelqu’un sur qui se défouler. Ils occuperont bien Segesvar le temps qu’on rentre et qu’on fasse des dégâts.

J’ai consulté ma montre.

— Tu comptes faire ça ce soir ?

— Demain, à l’aube. On attend Aiura, et d’après Tanaseda, elle ne sera pas là avant le soleil. Ah oui… (Il a relevé la tête et indiqué le ciel.) Et il y ale climat.

J’ai suivi son regard. De gros contreforts de nuages noirs s’empilaient au-dessus de nos têtes, se pressant vers l’ouest depuis un ciel orangé où la lumière d’Hotei luttait encore pour se faire sentir. Daikoku était depuis longtemps noyée dans la lueur de l’horizon. Et à présent que je le remarquais, un vent frais soufflait sur la Prairie et apportait l’odeur inimitable de la mer.

— Qu’est-ce qu’il a, le climat ?

— Il va changer. (Murakami a reniflé.) La tempête qui était censée s’épuiser au sud de Nurimono ? Finalement, non. Et maintenant, on dirait qu’elle a trouvé un drôle de courant nord-ouest, et elle revient.

L’Oreille d’Ebisu.

— Tu es sûr ?

— Bien sûr que non, Tak, c’est de la prévision météo. Mais même si on ne la prend pas en pleine poire, un peu de vent violent et de pluie horizontale ne pourra pas faire de mal, hein ? Les systèmes chaotiques, c’est exactement ce qu’il nous faut.

— Ça, ça dépend des talents de pilote de Vlad l’Avaleur de meth, là. Tu sais comment on appelle une tempête qui fait demi-tour, par ici ?

Murakami m’a regardé, vide d’expression.

— Non. Manque de bol ?

— Non. On l’appelle l’Oreille d’Ebisu. À cause de la légende des pêcheurs.

— Ah oui…

Au sud, Ebisu n’est plus lui-même. Dans les régions nord et équateur de Harlan, la prédominance de la culture japamanglaise a fait de lui le dieu populaire des mers, patron des marins et, en général, une divinité bienveillante. Saint Elme est lui aussi accueilli comme archétype de dieu amical, pour inclure les résidents plus influencés par le christianisme. Mais à Kossuth, où l’héritage des ouvriers d’Europe de l’Est qui ont aidé à bâtir Harlan se fait plus sentir, cette approche ultratolérante n’est pas en vigueur. Ebisu est une présence sous-marine démoniaque qui sert à faire peur aux enfants. Un monstre de légende contre lequel saint Elme doit se battre pour protéger les fidèles.

— Tu te rappelles comment l’histoire se termine ?

— Bien sûr. Ebisu donne des cadeaux phénoménaux aux pêcheurs en échange de leur hospitalité, mais il oublie sa canne à pêche, c’est ça ?

— Pile.

— Donc, euh, il revient la chercher, et juste avant de frapper à leur porte, il les entend critiquer son hygiène. Ses mains sentent le poisson, il ne se brosse pas les dents, ses vêtements sont en mauvais état… Tous les trucs qu’on doit apprendre aux gamins, c’est ça ?

— C’est ça.

— Oui, je me rappelle que je racontais ce truc à Suki et Markus, quand ils étaient petits. (Le regard de Murakami s’est perdu dans le lointain et les nuages qui s’y massaient.) Ils doivent avoir au moins un demi-siècle, maintenant. Tu y crois ?

— Finis l’histoire, Tod.

— Ah oui. Euh, alors, Ebisu est furax, il débarque, prend sa canne et ressort. Et là, tous les cadeaux qu’il avait donnés se transforment en belalgue pourrie et en poissons morts dans son sillage. Il plonge dans la mer et les pêcheurs ont des prises exécrables pendant plusieurs mois. Morale de l’histoire, prenez soin de votre hygiène personnelle, mais surtout, les gosses, ne parlez pas des gens derrière leur dos. (Il m’a regardé.) Comment j’étais ?

— Pas mal, après cinquante ans. Mais ici, on la raconte un peu différemment. Tu vois, Ebisu est très laid, il a des tentacules, un bec et des crocs. Il est terrifiant et les pêcheurs ont du mal à ne pas s’enfuir en hurlant. Mais ils maîtrisent leur peur et lui offrent l’hospitalité, ce qu’on n’est pas censé faire avec un démon. Alors Ebisu leur donne toutes sortes de cadeaux volés dans des bateaux qu’il a coulés par le passé, et il part. Les marins poussent un gros soupir de soulagement, et commencent à discuter. « Tu as vu comme il était monstrueux, terrifiant, comme on a été malins de récupérer tous ces cadeaux », et au milieu de tout ça, il revient chercher son trident.

— Pas une canne à pêche, alors ?

— Non, ça ne faisait sans doute pas assez peur. C’est un gros trident barbelé, dans cette version.

— Ils auraient pu le remarquer, quand même. Imagine, un…

— La ferme. Ebisu les entend dire du mal, et il repart vert de rage. Puis il revient sous forme d’une grosse tempête qui détruit tout le village. Ceux qui ne sont pas noyés sont emportés par ses tentacules et passent une éternité de souffrance dans un enfer aquatique.

— Charmant.

— Oui, la morale est la même. Ne parlez pas des gens dans leur dos mais surtout, ne faites pas confiance à ces sales divinités étrangères venues du nord. (J’ai perdu mon sourire.) La dernière fois que j’ai vu l’Oreille d’Ebisu, j’étais encore gosse. Elle est venue par le bord est de Newpest et a ravagé les constructions de l’intérieur des terres sur des kilomètres le long de la côte de la Prairie. Ça a tué une centaine de personnes sans se fatiguer. Ça a coulé la moitié des cargos à algue dans le port avant même qu’on puisse les activer. Le vent a soulevé les glisseurs légers et les a jetés dans les rues jusqu’à Harlan Park. Par ici, l’Oreille est une très mauvaise nouvelle.

— Oui, surtout quand on promène son chien dans Harlan Park.

— Je suis sérieux, Tod. Si cette tempête arrive et que ton pote Vlad ne sait pas tenir son rafiot, on a des chances de se retrouver dans la soupe à respirer de la belalgue avant d’arriver chez Segesvar.

Murakami a froncé les sourcils.

— Laisse-moi m’inquiéter de Vlad. Toi, concentre-toi sur un plan d’assaut qui pourrait marcher.

J’ai opiné de la tête.

— D’accord. Un plan d’assaut qui marche sur la principale place forte haiduci de l’hémisphère Sud, avec des ados junkies comme troupes d’assaut et une tempête mortelle comme couverture. À l’aube. Bien sûr. Facile, pour moi.

Un froncement de sourcils, puis, d’un coup, il a ri.

— Maintenant que tu me présentes les choses comme ça, j’ai hâte d’y être. (Il m’a donné une claque sur l’épaule et s’est dirigé vers le glisseur pirate, sa voix flottant jusqu’à moi.) Je vais aller parler à Vlad. Putain, on va s’en souvenir, Tak. Tu verras. J’ai un bon feeling. L’intuition diplo.

— C’est ça.

Et à l’horizon, le tonnerre roulait comme s’il était piégé dans l’espace étroit entre les nuages et le sol.

Ebisu revenait chercher son trident, et il n’était pas très content de ce qu’il venait d’entendre.

Furies Déchaînées
titlepage.xhtml
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_000.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_001.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_002.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_003.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_004.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_005.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_006.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_007.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_008.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_009.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_010.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_011.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_012.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_013.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_014.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_015.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_016.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_017.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_018.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_019.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_020.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_021.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_022.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_023.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_024.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_025.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_026.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_027.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_028.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_029.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_030.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_031.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_032.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_033.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_034.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_035.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_036.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_037.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_038.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_039.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_040.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_041.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_042.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_043.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_044.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_045.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_046.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_047.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_048.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_049.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_050.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_051.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_052.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_053.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_054.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_055.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_056.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_057.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_058.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_059.html
Morgan,Richard-[Takeshi Kovacs-3]Furies Dechainees_split_060.html